Le Consistoire Central des Danites de Côte d’Ivoire est à la pointe des efforts pour prouver les racines hébraïques de son peuple. Un tournant majeur a été franchi avec un test ADN récemment réalisé sur une jeune fille Danite. Les résultats, inédits, apportent des preuves concrètes qui pourraient transformer la quête de reconnaissance de l’identité hébraïque des Danites. Paul METTE, Président du Consistoire, analyse ces résultats et leur importance dans ce processus historique.
Monsieur le président, il nous a été rapporté qu’un test ADN a été fait sur une jeune fille Gouro, un groupe ethnique faisant partie de la communauté des Danites. Et ce test aurait donné des résultats en lien avec les origines hébraïques des Danites. En êtes-vous informé? Si oui, que disent exactement ces résultats?
En effet, je suis bien informé de ce test ADN réalisé sur une jeune fille Danite que nous appellerons Naomi pour préserver son anonymat. Cette jeune fille est issue d’un père Gouro et d’une mère Gagou, deux groupes ethniques faisant partie de notre communauté. Elle a effectué cette analyse génétique en Allemagne en 2018, dans le cadre de recherches visant à explorer plus profondément nos origines hébraïques.
Je tiens à préciser que je ne suis pas un expert en matière génétique et que je vous présente ces résultats de manière profane. Toutefois, selon ce que nous avons observé, les résultats de cette analyse révèlent une origine mixte : 45% d’ADN éthiopien, 12% du Yémen, 7% du Soudan, 9% du Burundi, 2% de Jordanie, 10% du Niger et 10% de Côte d’Ivoire. Ces résultats sont très révélateurs et montrent une diversité culturelle et ethnique interne, mais surtout ils confirment des liens avec des régions historiquement associées à l’héritage hébraïque, notamment l’Éthiopie, le Yémen et la Jordanie. C’est un jalon important dans notre quête de reconnaissance.
Quels objectifs vise un tel test ?
Ce test vise principalement à approfondir notre compréhension des origines des Danites et à fournir des éléments concrets pour appuyer nos recherches. Depuis plusieurs décennies, notre communauté travaille à faire reconnaître ses racines hébraïques. L’un des objectifs clés de ce test est donc d’explorer les traces génétiques que nous avons pu conserver au fil des siècles. Nous savons que les Danites ont migré depuis le Levant, en passant par l’Égypte, l’Éthiopie, et d’autres régions d’Afrique avant de s’établir définitivement en Côte d’Ivoire. Ce type de test permet de tracer ce parcours historique, de comprendre les différentes influences et de renforcer nos dossiers auprès des autorités rabbiniques et politiques d’Israël et du monde juif.
Toutefois, il est essentiel de rappeler que les preuves génétiques ne sont qu’un aspect. Nous avons toujours mis l’accent sur la collecte de preuves historiques, culturelles et anthropologiques. Ce test ADN complète ces efforts mais n’est pas une finalité en soi.
Quelles interprétations ressortent de ces résultats ?
Ces résultats confirment et renforcent ce que nous avons toujours cru : nos racines hébraïques. La présence importante d’ADN éthiopien, ainsi que les traces génétiques du Yémen et de la Jordanie, sont parfaitement en accord avec le parcours migratoire que nos ancêtres ont entrepris. Nous savons que les Danites ont quitté Israël, fuyant l’invasion assyrienne, et ont traversé plusieurs régions avant de s’établir en Afrique de l’Ouest.
L’Éthiopie, en particulier, a été un lieu de passage prolongé pour notre peuple. C’est là que nous partageons des similitudes culturelles avec les Falashas ou Beta Israël, reconnus comme descendants de la tribu de Dan. Ces similitudes et ces résultats génétiques renforcent notre conviction que nous faisons partie de l’histoire hébraïque. Cependant, il est important de souligner que ces résultats ne sont qu’une pièce du puzzle dans notre quête pour mieux comprendre nos origines.
Quel impact peut avoir ce test par rapport au combat des Danites pour la reconnaissance de leurs origines hébraïques ?
Ce test représente un jalon important dans notre combat pour la reconnaissance officielle de nos racines hébraïques. Bien que certains pourcentages, comme les 2% de Jordanie, puissent sembler faibles, ils sont symboliquement très puissants, car c’est de cette région, à l’est du Jourdain, que les Danites ont commencé leur exil. Le Yémen et l’Éthiopie, également des étapes cruciales dans notre migration, renforcent notre dossier de reconnaissance auprès des autorités juives et politiques en Israël.
Cependant, il est essentiel de rappeler que le retour des Danites d’Éthiopie, par exemple, ne s’est pas fait sur la base de tests ADN à notre connaissance, mais sur des preuves historiques et spirituelles. Le test ADN apporte un éclairage supplémentaire, mais il doit être accompagné de recherches anthropologiques, historiques et sociologiques pour constituer un dossier solide et irréfutable.
Pourquoi accordez-vous tant d’importance à cette reconnaissance ? Ne vous sentez-vous pas heureux d’être Ivoiriens ?
Bien sûr, nous sommes fiers de vivre en Côte d’Ivoire, et notre attachement à ce pays est réel. Toutefois, il est important de rappeler que la Côte d’Ivoire doit être considérée comme un pays d’accueil pour les Danites, et non comme leur pays d’origine. Nos véritables racines remontent à Israël, d’où nous avons migré il y a des siècles.
La quête de reconnaissance de nos origines hébraïques n’a donc rien à voir avec un rejet de notre présence en Côte d’Ivoire. Au contraire, elle nous permet de rétablir une vérité historique et spirituelle tout en continuant de contribuer à la société ivoirienne. Nous cherchons à reconnecter avec notre passé hébraïque, qui fait partie intégrante de notre identité.
C’est pourquoi j’appelle tous nos frères et sœurs Danites à se mobiliser activement pour cette cause. Une réunion cruciale est prévue le 29 septembre 2024 dans la Commune d’Abobo, avec la participation de tous les chefs traditionnels des dix groupes ethniques de notre communauté : les Yacouba ou Dan, les Gouro ou Kwéni, les Gagou ou Gban, les Toura, les Kla, les Mona, les Wan ou Ouan, les Ngen, les Gbain, et les Yawolè. C’est ensemble que nous pourrons réussir à faire reconnaître notre histoire et notre identité hébraïque.
Interview réalisée par Dan Opéli