Les faits – Le chef de l’Etat a annulé un déplacement à Marseille ce lundi pour se rendre à Moscou, puis à Kiev sur fond de crise diplomatique entre la Russie, l’Union européenne et les Etats-Unis.
La future candidature d’Emmanuel Macron se situe quelque part entre Johnny Hallyday et François Mitterrand, pour l’instant plus proche du chanteur que de l’ancien président socialiste. Dès le 4 janvier, il confiait son envie d’avoir envie dans les colonnes du Parisien. Sera-t-il pour autant en capacité de laisser du temps au temps ?
« La tendance de la campagne est à l’immersion, même si rien n’est arbitré », confie un salarié du QG. Aux meetings, le Président, futur candidat, privilégierait alors des déplacements au contact des Français, plus chronophages. « Emmanuel Macron ne changera pas sa façon d’être. Des déplacements de plusieurs jours, il en a fait plein durant le quinquennat. C’est quelque chose qu’il apprécie. Il ne changera pas aujourd’hui », poursuit le même conseiller.
Cette formule faite de déambulations et d’échanges informels avec les Français a l’inconvénient de réclamer du temps là où une campagne de réunions publiques est plus facile à intégrer dans un agenda présidentiel. Surtout avec un « maître des horloges » qui n’a pas pour habitude de regarder sa montre. Si vous voulez tenir un programme strictement minuté, mieux vaut placer celui-ci derrière un pupitre plutôt que de le laisser se promener dans les villes et villages français.
Essuie-glace. Avec l’inconvénient de priver la campagne de chaleur humaine. « La situation sanitaire ou les crises internationales peuvent compliquer la campagne d’Emmanuel Macron dans le sens où les Français pourraient croire qu’il est impossible d’être au four et au moulin », juge un député de la majorité. A ce titre, le chef de l’Etat devra donner des gages d’implication dans la bataille pour l’Elysée peu importe la charge qui pèsera sur ses épaules présidentielles. « Si vous voulez éviter de faire l’essuie-glace entre le candidat et le Président, vous devez construire des séquences d’immersion, qui ne peuvent pas se limiter à deux heures », grimace un ministre. Celui-ci constate par ailleurs que tout présidentiels soient-ils, les récents déplacements ont été rapidement digérés par les médias.
Ce fut le cas pour ceux dans les Alpes-Maritimes le 10 janvier, la Creuse et la Haute-Vienne les 24 et 25, et les Hauts-de-France le 2 février. Ces visites ont épousé le même schéma : plusieurs thématiques traitées dans le même voyage, des annonces techniques et un moment au contact de la population. Mais là où avant 2022, Emmanuel Macron consacrait deux jours ou plus à de telles « immersions », selon le mot de l’Elysée, le temps s’est aujourd’hui réduit. Celui dans le Nord et le Pas-de-Calais n’a duré qu’une demi-journée. C’est court pour traiter les questions de réhabilitation du bassin minier, du dixième anniversaire du Louvre-Lens et de la politique européenne d’immigration. A titre de comparaison, son « itinérance mémorielle » avait duré cinq jours en novembre 2018. La caravane présidentielle avait alors parcouru onze départements de l’est et du nord de la France.
Contraste. Le sujet des « séquences », longues dans le temps, se pose déjà pour l’entrée en campagne. Un « oui, je suis candidat » d’Emmanuel Macron devra être suivi d’une explication de cette candidature, puis d’un premier acte de campagne, avance un ministre, qui exclut l’idée d’une déclaration la veille d’un rendez-vous international et renvoie ainsi le jour J au-delà du 20 février.
Ne pas se précipiter et être agile, prêt à exploiter la moindre fenêtre de tir. Facile à dire pour une équipe de campagne, difficile à faire pour un Président, sollicité par Joe Biden pendant une visite du Louvre-Lens et contraint de passer un lundi à Moscou et un mardi à Kiev. La majorité présidentielle promet qu’il sera « avec vous », au milieu des Français, si proches d’eux qu’on pourrait ne les appeler que par leur prénom. Il faut du temps pour cela.
Cette position inconfortable n’a pas échappé à ses adversaires. Un soutien de Valérie Pécresse assure que sa candidate prendra le temps de rencontrer les Français plutôt que d’enchaîner les meetings pour jouer le contraste entre la candidate Les Républicains et le président de la République. « Moins de discours, plus de proximité », résume cet élu.
La ligne actuelle de l’équipe de campagne est finalement simple. Un conseiller la résume ainsi : « On jongle entre ce que l’on aimerait faire et ce que l’on pourra faire. » Tout comme le futur candidat.
Source : L’Opinion.fr