L’ex-président ivoirien Henri Konan Bédié a été accusé à tort ou à raison de “baouliser” ou “akaniser” la fonction publique en Côte d’Ivoire avec son concept d’ivoirité lancé le 26 août 1995. Cependant le rattrapage ethnique et l’obligation d’appartenir au RHDP, érigés en mode de gouvernance par le chef de l’Etat, Alassane Ouattara, ne favorisent que division et exclusion contrairement à l’intérêt général et au bien-être des citoyens.
« La propagande faite sur le thème de l’ivoirité est une propagande de mobilisation et de combat pour unifier les Ivoiriens autour de la pyramide baoulé » extrait de Entretien avec H. Memel-Fotê, cf. B. Hugodot, L’ivoirité, Analyse géopolitique de l’ivoirité, Mémoire de DEA, université de Paris VIII, 1999/2000, p. 59. L’éminent anthropologue voyait en ce concept d’ivoirité un des moyens de pérenniser l’akanité, c’est-à-dire la domination absolue des Akan en général et des Baoulé (ethnie du Président Bédié) en particulier, sur la société ivoirienne.
Hélas les tares dénoncées hier sont érigées aujourd’hui en mode de gouvernance.
« On avait pourtant dénoncé ça, l’ivoirité, le rattrapage ethnique, le travail en ‘‘sefon’’culture de postes…Tout ça n’est pas bon pour la réconciliation… », dixit Tiken Jah Fakoly dans le titre ‘‘On a dénoncé’’.
A juste titre car tout observateur avéré de la politique ivoirienne s’étonne face à la justification de la politique de rattrapage par Alassane. L’opposant, qui s’est longtemps dit victime d’exclusion, tombe dans les mêmes travers. Le dernier acte de népotisme reste celui de la nomination de sa nièce Nina Kéita. Mannequin à New York (USA), égérie de plusieurs marques de cosmétiques comme Black up ou de lignes de vêtements tel que Old Navy, elle est propulsée en 2017 en qualité de conseillère spéciale du ministre du budget chargé de la communication. En 2019, elle est élevée au rang de DGA de la GESTOCI en charge de superviser les stocks pétroliers. Quel contraste pour l’économiste qui a étudié aux Etats-Unis, censé être imprégné de la méritocratie.
Par-dessus l’ascension de la nièce mannequin à la vitesse de la lumière, il n’est point erroné d’affirmer que sous Ouattara, il faut être ressortissant du Nord ou RHDP pour prétendre occuper un poste de responsabilité dans l’administration. A l’Ivoirité de Bédié, Ouattara a répondu par le rattrapage ethnique, la Dioulaterie ou la Dioulatisation.
L’adage bien connu des Ivoiriens, selon lequel, le poisson pourrit toujours par la tête, illustre bien cette inclinaison des dirigeants de ce pays à semer la division et l’exclusion entre les citoyens. Malheureusement ces concepts d’Ivoirité et de Rattrapage ethnique ne sont pas sans conséquence sur la nation. Nous y reviendrons.