La tension monte à Abidjan. Contestant la réélection du président, ses opposants Bédié et N’Guessan ont annoncé vouloir préparer un nouveau scrutin. Leurs domiciles ont été encerclés par les forces de l’ordre mardi 3 novembre
La police ivoirienne s’est déployée mardi 3 novembre à Abidjan devant les maisons des deux principaux opposants à Alassane Ouattara. Ils sont accusés de sédition après avoir annoncé la création d’un conseil de transition en réaction à l’annonce de la réélection du chef de l’Etat de 78 ans.
Les policiers, en tenue antiémeute, ont dispersé à l’aide de gaz lacrymogène des partisans de l’opposition et des journalistes rassemblés devant la résidence de l’ancien président Henri Konan Bédié, qui a appelé au boycott du scrutin après avoir été candidat. Les forces de l’ordre ont également encerclé la maison de l’ancien Premier ministre Pascal Affi N’Guessan, également partisan du boycott, a déclaré son épouse à Reuters. « Les gendarmes ont encerclé la maison et nous ne pouvons pas partir », a confié Angeline Kili.
Selon un témoin, le domicile d’Assoa Adou, secrétaire général du Front populaire ivoirien (FPI), le parti de l’ancien président Laurent Gbagbo, a aussi été investi.
La commission électorale ivoirienne a annoncé mardi matin la victoire d’Alassane Ouattara à l’élection présidentielle du 31 octobre. Le président sortant a été réélu pour un troisième mandat avec 94,27% des voix, selon des résultats encore partiels. Faisant part de ces résultats, le président de la commission électorale a déclaré que le taux de participation s’était élevé à 53,9% des inscrits. Il appartient désormais au Conseil constitutionnel de valider les résultats et de proclamer le vainqueur après avoir étudié les éventuels recours de candidats.
L’opposition a dénoncé la candidature du président sortant comme une tentative illégale de se maintenir au pouvoir, alors que le nombre de mandats présidentiels consécutifs était jusqu’ici limité à deux. Alassane Ouattara estime que la nouvelle Constitution adoptée en 2016 l’autorisait à briguer un troisième mandat.
Sédition. Ce désaccord a provoqué des heurts en amont de l’élection, avec au moins 30 personnes tuées. Au moins cinq personnes supplémentaires ont trouvé la mort samedi, selon des représentants.
Henri Konan Bédié et Pascal Affi N’Guessan ont refusé de reconnaître la victoire du président sortant et ont annoncé la création d’un conseil de transition dirigé par Bédié. Cette instance sera chargée « de préparer un cadre pour l’organisation d’une élection présidentielle transparente et inclusive » et formera un gouvernement rapidement, a déclaré Pascal Affi N’Guessan au cours d’une conférence de presse.
Le gouvernement a réagi en publiant un communiqué dans lequel il accuse les opposants de sédition et demande au ministère public d’engager des poursuites. Dans un communiqué commun, l’Onu et la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ont appelé l’opposition à abandonner l’idée d’un conseil transitoire et à engager un dialogue avec le pouvoir en place.
En 2010, l’annonce de la victoire d’Alassane Ouattara, rejetée par le président sortant Laurent Gbagbo, avait déclenché une guerre civile de plusieurs mois. Alassane Ouattara avait accédé au pouvoir après la victoire de ses forces en 2011. Le conflit avait fait quelque 3 000 morts. Selon l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR), les tensions électorales ont incité 3 200 Ivoiriens à fuir dans les pays voisins, dont un millier qui sont arrivés au Liberia au cours des dernières 24 heures.