DROGUE / ENQUÊTE EXCLUSIVE : sur les traces du réseau de  renseignement des dealers en Côte d’Ivoire

Dans la chaine de la vente des drogues, il y a des réseaux de renseignements. Nous avons cherchez à les suivre dans certains quartiers d’Abidjan.
De plus en plus l’on assiste à une expansion des réseaux de drogue en Côte d’Ivoire, sans que les auteurs n’en soient inquiétés. Tout le pays est désormais quadrillé pas ces trafiquants, exposant ainsi la vie des honnêtes citoyens. Les fumoirs fleurissent avec de nouvelles méthodes pour échapper à la vigilance des forces de l’ordre. Nous avons fait le tour des 10 quartiers où se déroule le plus cette activité dans le district d’Abidjan. Cela, pour comprendre comment procède les trafiquants pour échapper aux contrôles de police.
A la recherche de l’information sur les méthodes des dealers, Yopougon nous facilite la tâche quand nous surprenons des responsables d’un syndicat d’artisans en pleine conversation, à la ferraille de Port-Bouet 2. Dans cette conversation il s’agissait d’une situation qui prévalait dans le quartier derrière les rails. « Hier un responsable du quartier m’a contacté afin que je mobilise les artisans d’Abobo pour les aider à incendier le fumoir qui se trouve dans leur quartier, car cette activité, selon lui, entraîne les enfants à la consommation de la drogue. Mais j’ai décliné l’offre, car ce n’est pas notre boulot mais celui des forces de l’ordre », explique l’un d’entre eux. Le deuxième lui relate comment le responsable du fumoir de son quartier gère son business. « Les gars ne rentrons pas dans ça. Ici même à Port-Bouët 2 leur chef travaille avec beaucoup de gérants de cabines et des mécaniciens. Imaginez-vous que de l’abattoir jusqu’à la mosquée Doukouré, il leurs donnent de l’argent pour qu’ils signalent toute présence suspecte dans le secteur. En plus de ça, il paye le loyer de certains parents du quartier et leur donne des sacs de riz pour qu’ils ferment leurs yeux sur son business. Chaque vendredi, il immole un gros bélier qu’il partage », explique t-il.
Par curiosité, nous faisons le trajet indiqué par le second intervenant. Nous remarquons que des personnes, dont des gérants de cabine, nous suivent du regard sur une certaine distance. Après ce premier secteur nous prenons la direction de la Sicogi, dans les encablures du 16e arrondissement, où se trouve un fumoir. Une fois sur place, le spectacle est surprenant avec des élèves, en tenues scolaire, qui gravitent autour des bistrots à proximité du fumoir. Notre présence aux alentours du fumoir irrite le responsable qui interpelle notre accompagnateur sur l’objet de notre visite. Il explique que c’est la même famille. Le Big Boss sourit et demande de ne pas nous attarder sur les lieux, car la police va débarquer d’un moment à l’autre, selon les informations qu’il a reçu.
Le spectacle que nous avons vécu nous a laissé sur nos fin. Des élèves qui sortent ou mettent de petits sachets de leurs sacs. Sont-ils les nouveaux passeurs de la drogue ? Mais, ce qui nous préoccupe le plus est de savoir comment le dealer sait que la police va, d’un moment à l’autre, investir les lieux. Notre accompagnateur confie que des personnes sont permanemment placées dans les encablures du commissariat du 16e arrondissement pour surveiller l’entrée et la sortie des policiers, ainsi que toutes les entrées qui conduisent au fumoir. « Quand il doit y avoir des descentes de policiers, c’est seulement les plus petits consommateurs de drogue qu’ils prennent; sinon les responsables ont déjà pris la fuite. Aujourd’hui je suis heureux d’avoir quitté ce milieu mafieux », avance t-il.
« Nous sommes impuissant face à cette situation, nous passons par tous les moyens pour que ces gens quittent notre quartier mais rien ne bouge dans ce sens. Ils ont même corrompu certains résidents qui refusaient le business. Aujourd’hui ils les ont dans leurs poches, vraiment dommage », s’exclame une riveraine du quartier. Quant à une autre elle craint pour l’avenir des enfants du quartier car, selon elle, chaque jour des élèves en tenue scolaire sont bien visibles dans le fumoir. Même si les deux secteurs visités l’on constate un danger lié à la consommation de la drogue qui pointe à l’horizon, le troisième visité nous donne froid dans le dos. Il s’agit du quartier Yahossehi, toujours à Yopougon. Ce quartier s’arrache, à lui seul, la palme d’or du danger lié à cette activité. Tous les accès menant à ce quartier sont bouclés par les surveillants rémunérés par les dealers. Ils ont des téléphones portables et des unités pour signaler toute entrée suspecte dans le périmètre.
A Yahossehi, tous les jours représente le 11 mai, date d’anniversaire de Bob Marley. La drogue y coule à flot. Le fumoir n’existe désormais que de nom car tous les endroits sont bons pour s’allumer un joint. Nous avons constaté dans notre enquête la présence d’un maquis dans chaque fumoir. Nous décidons de visiter un célèbre maquis: le Gbessèh-Gbessèh. Dès notre arrivée, nous avons eu l’impression d’être dans une maison en plein incendie avec la fumée de la drogue qui s’envolait et l’odeur nauséabonde qui nous accueillait.
Des adultes hommes, femmes et des adolescents en pleine partie de «décalage» comme en Colombie. A cela s’ajoute la prostitution à ciel ouvert en pleine journée, d’où l’expression «bèssèh gbèssèh». Tout se vend au prix de 500 F Cfa. Parmi les produits commercialisés figurent les belles de nuits, des gamines de 14 à 17 ans, la drogue, les comprimés appelés trémorle qui mettent les consommateurs dans un état second… Un riverain se confie à nous. « Mon frère, si ce n’est pas moi, n’aborde pas la question de la drogue ici sinon c’est ton corps tes parents vont ramasser à Yahossehi, si tu as la chance. Nous on est habitué à ça dans le quartier. Nos enfants naissent et grandissent dans ça. Seuls ceux qui ont un esprit fort ne rentrent pas dans cette activité, sinon 70% des jeunes du quartier en consomment. Nous avons peur pour nos enfants qui vont à l’école parce que beaucoup d’enfants ont été déscolarisés du fait de la drogue. Nous ne pouvons rien faire face à ces personnes bien organisées et dont on ne connaît pas les soutiens », explique SM. « Ici les lois sont dictées par les dealers et ça ne va pas quelque part. Quelqu’un peut même rentrer dans ta maison et te frapper…»
Le lendemain très tôt le matin nous prenons la route de la zone Abidjan Sud avec les communes de Port-Bouet, dans les quartiers Gonzaqueville, Anani et Adjoufou. Ensuite les communes de Marcory, Koumassi avec les quartiers Soweto et Divo. Dans les secteurs cités c’est le même constat.
A la question de savoir combien reçoivent ces personnes qui se chargent de jouer les agents de sécurité et de renseignements, des bouches indiscrètes nous laissent entendre que le salaire journalier des surveillants dépend des entrées. Ceux qui font la journée ont entre 5000 et 10000 F Cfa. Ceux de la nuit entre 5000 et 15000 F Cfa. Pour les superviseurs entre 20000 et 30000 F Cfa pour ceux qui font la nuit.
Silvère Bossiei

 

 

 


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