Abidjan, Soubré, Bloléquin…La soif des populations ivoiriennes de se faire justice grandit. Député, maire, gendarme, préfet et autre symbole de l’Etat…tout y passe. Une fronde citoyenne qui semble loin de se terminer.
Coup pour coup. Les populations ivoiriennes semblent radicalisées au point de repondre par la maxime œil pour œil, dent pour dent, au régime d’Abidjan. Si le député Yah Touré a manqué de se faire lyncher par une foule suite à la gifle infligée à une policière, le maire de Soubré a été moins chanceux. Après l’incendie du marché le 16 février dernier, les populations en colère ont mis le feu à sa résidence l’accusant à tort ou à raison en d’être l’auteur. La dernière en date des scènes de guerilla urbaine : Bloléquin (Ouest, 600 km d’Abidjan). La riposte des populations a été fatale, samedi 17 février dernier, suite à une bavure d’un gendarme portant sur un jeune conducteur de taxi-moto. Un gendarme battu à mort, les locaux de la gendarmerie et de la préfecture partis en fumée.
Si les populations s’entendent comme larrons en foire à Soubré et Bloléquin pour la tolérance zéro, cela a le mérite d’extérioriser les braises ardentes qui couvent sous la cendre chaude. D’emblée, la violence a été le mode d’accession du régime Ouattara au pouvoir d’Etat. Du reste, les occupants du palais présidentiel ne comprennent que le message de la violence. Les milliards de Frs Cfa distribués aux ex-rebelles qui ont choisi les kalachs comme forme de revendication l’attestent. Les kalachs font office d’argument massue. Pendant ce temps, déguerpissements sans dédommagement, taxes, privation des libertés, clanisme et rattrapage ethnique éttoufent le peuple. Quant au chantier de la réconciliation nationale, il reste entier. « On ne peut pas ignorer la moitié de la population et faire comme si la Côte d’Ivoire était réconciliée.
Les procès iniques faits aux pro-Gbagbo sont là pour nous rappeler que la justice des vainqueurs ne vise qu’un seul camp tandis que l’autre jouit d’une totale impunité et bénéficie de privillèges scandaleux. », s’insurgeait Danielle Boni Claverie, présidente de l’Union Républicaine pour la Démocratie (URD) jeudi 1er février 2018. Mais le summum de l’impunité en Côte d’Ivoire demeure ces ex-enfants soldats, proches du régime Ouattara, connus sous l’appelation ‘‘microbes’’ qui tuent à coup de machettes et de couteaux au vu et au su de tous. Enfin, lorsque des cordonniers sont promus au grade de lieutenant pour avoir été membres de la rébellion, il est clair que la méritocratie n’a plus sa place sur les bords de la lagune ébrié.
En somme, le navire Ivoire va à vau-l’eau et le capitaine a perdu le contrôle. C’est peu de la dire. Ebranlé par la cacophonie de son armée, Alassane Ouattara a menacé de démissionner de sa fonction le 15 mai 2017. A sa suite, son chef d’Etat-major, le général Sékou Touré, esseulé par les clans Gon Coulibaly, Hamed Bakayoko et Guillaume Soro au sein de l’armée, a également ménacé de quitter son poste en février 2018. A quel saint les populations devraient-elle donc se vouer ?
Cyrille NAHIN