Journée de désolation et d’horreur jeudi 25 juillet à Adjamé-village. Les populations ont été réveillées par des bulldozers envoyés par le gouverneur du District d’Abidjan pour détruire habitations et commerces. Selon les autorités, l’opération se situe dans le cadre de la libération des emprises du 4ème pont d’Abidjan. Mais les habitants du quartier n’ont pas voulu. Ils ont opposé une résistance farouche en érigeant des barricades.
Mais les exécutants des démolitions ont usé de moyens conventionnels et non conventionnels pour imposer les démolitions. Des civils munis de gourdins et même d’armes à feux ont fait irruption sur « le champ de bataille » aux côtés des forces de l’ordre. Il s’agit des « microbes », ces adolescents abonnés aux violences depuis la crise post-électorales de 2010-2011. Ils ont toujours pris fait et cause pour le régime en place. Jeudi 25 juillet, ils ont encore joué leur partition. On a assisté alors à des affrontements avec d’un côté, forces de l’ordre et « microbes » et de l’autre côté jeunes d’Adjamé village. La force des gourdins, des gaz lacrymogènes et des matraques a fini par imposer les machines. Les maisons et les commerces ont été détruits.
Quelques jours avant cette opération, le Premier Ministre Beugré Mambé avait présenté au public une brigade de lutte contre le désordre urbain, forte de 295 agents issus des polices municipales et de la police du district autonome d’Abidjan. Sa mission: la libération des emprises des grandes artères, la libération des espaces publics, la libération des espaces non constructifs et l’application de l’arrêté portant interdiction du commerce ambulant, de la mendicité et de l’utilisation de charrettes. Ces derniers ont donc fait leur baptême de terrain jeudi à Adjamé-village.
Au lendemain de l’opération, la presse ivoirienne était partagées entre ceux qui compatissaient à la détresse des populations d’Adjamé village et ceux qui justifiaient l’opération. Alors que les chefs Atchans du village soutiennent n’avoir pas été associé au processus, les journaux proches du pouvoir estiment que les riverains sont de mauvaise foi puisqu’ils ont été avertis plusieurs mois avant. Mieux, ils ont réçu des sommes d’argent en guise de dédommagement. Mais, la publication des listes par voie de presse et réseaux sociaux a créé la polémique, la plupart des bénéficiaires n’étant pas des Atchans,propriétaire terrien d’Adjamé-village.
Depuis sa nomination le 27 décembre 2023 en qualité de Ministre gouverneur du District d’Abidjan, Ibrahim Cissé Bacongo conduit une vaste opération de déguerpissement décriée par les populations. Mais l’intervention des adolescents armés jeudi à Adjamé village suscite des inquiétudes. Des observateurs soulignent que ces « microbes » ont donné un exemple de ce qui se passera en 2025, année électorale. Une période de protestations et de violences en Côte d’Ivoire depuis 1995.
Dan Opéli