L’officialisation de la victoire au Plateau, le quartier des affaires d’Abidjan, du candidat du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) qui avait claqué la porte de la coalition gouvernementale en août, a fait baisser la tension dans la capitale économique au moment où des incidents se sont produits dans l’intérieur du pays, notamment à Grand Bassam.
« Eh-oh, Ehouo! Ehouo! », scandaient les partisans de Jacques Ehouo au moment de l’annonce par la Commission électorale indépendante (CEI) de la victoire de leur candidat au Plateau, la commune la plus riche du pays. Au QG de campagne, les militants ont explosé de joie et plusieurs milliers de personnes ont afflué pour fêter la victoire.
Le 15 octobre, les résultats provisoires des élections couplées – municipales et régionales – continuaient d’être communiqués par la Commission électorale indépendante (CEI), deux jours après le scrutin. Selon les premiers résultats connus, encore partiels, le RHDP (mouvance présidentielle) est en tête, tandis que plusieurs barons confirment leur puissance électorale dans leur fief.
La tension était retombée dans la matinée, leur adversaire, Fabrice Sawegnon, ayant déjà reconnu sa défaite sur les réseaux sociaux : « Les derniers dépouillements ne sont pas en notre faveur. Malgré tous les éléments de recours documentés dont nous disposons, nul engagement, nulle conviction ne vaut la paix et la stabilité. »
Un duel phare
Ce duel entre Sawegnon, spécialiste de la communication ayant orchestré les campagnes de plusieurs chefs d’Etat africains, soutenu par la coalition du président Alassane Ouattara, et Jacques Ehouo, le député de la circonscription surnommé « Sans bruit », était l’un des affrontements phare des municipales du 13 octobre. Sawegnon avait fait une grosse campagne pour prendre la mairie de la commune la plus riche du pays, contrôlée jusqu’en août par Noël Akossi Bendjo, membre du PDCI. Celui-ci avait été révoqué pour détournement de fonds mais plaidé son innocence.
L’annonce des résultats au Plateau a donné lieu à un imbroglio électoral. Le 14 au soir, une fois le dépouillement terminé, la Commission électorale du Plateau n’a pas procédé à la compilation des voix en raison de l’absence mystérieuse de ses deux présidents. Après une nuit de tension, les urnes avaient été transférées dimanche à la CEI départementale. Les forces de l’ordre y avaient alors dispersé les manifestants avec des gaz lacrymogènes. En début d’après-midi, lors de la compilation, la CEI, sans proclamer de résultats, avait semblé donner la victoire à Sawegnon, malgré les protestations des représentants de M. Ehouo.
Des blessés à Bassam
Le 15 dans la soirée, la dispersion d’une marche de plusieurs centaines de personnes soutenant Ehouo avait donné lieu à des échauffourées. La coalition au pouvoir, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) continue toutefois à contrôler la capitale économique puisque elle remporte notamment les communes de Koumassi, Treichville ainsi que les deux grands quartiers populaires de Yopougon et Abobo.
Parmi les autres résultats, la CEI a annoncé la victoire à Grand Bassam du RHDP, générant des troubles dans la cité balnéaire où le RHDP et le PDCI réclamaient tous deux la première place. Des jeunes ont érigé des barrages en début d’après-midi dans le quartier France. Plusieurs personnes avaient été blessées dans la nuit de dimanche dans une charge de la police contre des habitants qui réclamaient la proclamation des résultats. A Daloa, dans le centre, une trentaine de jeunes ont fait irruption à la CEI locale et ont emporté un sac contenant des procès-verbaux des élections.
Plus de six millions d’Ivoiriens étaient appelés à voter à ces élections locales, dont le principal enjeu était de mesurer les forces en présence avant la présidentielle de 2020, notamment parmi les membres de l’ex-coalition au pouvoir. Principalement composée du PDCI de l’ancien président Henri Konan Bédié et du parti du président Alassane Ouattara, le Rassemblement des républicains (RDR), la coalition au pouvoir, le RHDP a explosé. Le PDCI a refusé de s’y maintenir, estimant que le parti de Ouattara tentait de l’absorber pour pouvoir présenter son candidat à la présidentielle. Le PDCI, qui a soutenu Ouattara en 2010 et 2015, entendait que le RDR lui rende la pareille en 2020 en soutenant un candidat PDCI. Le parti tenait lundi un congrès extraordinaire.
Retrouvez cet article sur Jeune Afrique