Les tentatives tous azimuts d’Alassane Ouattara et de ses alliés venus du PDCI-RDA, d’inféoder le parti d’Houphouët-Boigny au RHDP viennent de buter encore une fois sur la fermeté d’Henri Konan Bédié. Perçue dans le milieu des cadres du PDCI (ayant préféré le RHDP à leur parti) comme celle de toutes les chances, la médiation du gouverneur Robert Beugré Mambé vient de se solder par un vraisemblable échec. A l’initiative du gouverneur du district d’Abidjan, fils Atchan, une forte délégation des chefs traditionnels du grand sud (précisément des départements d’Abidjan, Grand Bassam, Bonoua, Aboisso, Adiaké, Tiapoum, Dabou, Jacqueville et Grand Lahou) s’est en effet rendue le mardi 30 avril 2019 chez le président Henri Konan Bédié à Daoukro.
Au nom de toutes les populations des trois régions administratives dont ils disent être les porte-voix après consultation, ces chefs traditionnels, par la voix de Faustin Agoudou, chef du village d’Akeïkoi, ont dit au président du PDCI, être venus le réconcilier avec le président Alassane Ouattara.
« Nous relevons avec tristesse et amertume que l’excellence qui caractérisait vos relations avec le président Alassane Ouattara a pris du plomb dans l’aile, de sorte que (…) Celui avec qui vous avez sauvez la Côte d’Ivoire du chaos relativement à la crise qui a ébranlé ce pays et dont nous gardons de mauvais de mauvais souvenirs…. (…) se retrouve aujourd’hui dans un schéma d’apparence opposition, laissant apparaître à nos yeux, et aux yeux de tous les ivoiriens une amorce de divorce au plan politique, entre des frères (…) » a-t-il situé le cadre de leur déplacement avant de préciser que « cette situation crée une atmosphère de crainte et de peur dans l’esprit de nos concitoyens »
En véritables « démagogues » qui ont laissé transparaître dans leur intervention que les populations sous leur autorité traditionnelle ne sont que militants des partis de Bédié et de Ouattara, soucieux de leur rapprochement, les chefs traditionnels au nom de leur porte-parole, ont rappelé à Bédié les sacrifices qu’il a déjà fait pour la paix en Côte d’Ivoire. Notamment le coup d’Etat de 1999, sa victoire spoliée de 2010 et sa décision de ne pas présenter de candidat en 2015. Se référant aux écritures saintes, ils l’ont exhorté a pardonner 7 X 77 fois toutes les humiliations et tords dont il a été l’objet. Non sans lui avoir rappelé que le dialogue est l’arme des forts et que de son dialogue avec Ouattara jaillira tous les arrangements pour la paix en Côte d’Ivoire.
A leur suite, un peu comme s’il avait auparavant la copie de leur discours et qu’il avait préparé sa réponse, le président Bédié a fait l’historique du RHDP dont la transformation en parti politique est considéré par lui, comme un second coup d’Etat dont il est victime. Il en conclura que toutes ces peurs et craintes évoquées par ses hôtes, sont du fait du RHDP en dehors duquel, il n’y a pas de salut. Il a rappelé le cas de leur fils Noël Akossi Benjo pour qui il a appelé à œuvrer pour son retour d’exil.
En véritable homme politique et comme pour expliquer aux chefs traditionnels l’impossibilité de leur mission, il leur a demandé en guise de conclusion « que peut-on faire », eu égard au fait que toutes les inquiétudes découlent des activités du RHDP Parti Unifié hors duquel il n’ a pas de salut
Voici le message du président Henri Konan Bédié à l’endroit des chefs
« (…) C’est un agréable plaisir pour moi de vous recevoir ce jour à Daoukro qui est aussi votre village, de vous recevoir une semaine après la commémoration de la résurrection du Christ. Espérons que les jours qui suivront, grâce aux prières des uns et des autres, apporteront beaucoup de bonheurs, une tranquillité de vie et la paix au peuple de Côte d’Ivoire. Les chefs traditionnels de l’Iffou, de Daoukro et moi-même, vous souhaitons une cordiale et chaleureuse bienvenue chez vous à Daoukro.
J’ai écouté, avec une attention bien soutenue, le message lu en votre nom à tous par votre porte-parole. Je vous en remercie. Son contenu est empreint de sagesse, tel que le recommande la vie en société. A savoir, la recherche constante du rapprochement, de l’harmonie, de la cohésion fraternelle et l’union indissoluble entre les fils et les filles d’une même communauté, d’une même famille, d’une même nation dans l’optique de consolider la paix sociale indispensable au progrès social, à la stabilité et au développement économique de notre pays. Telles ont toujours été également ma vision et ma conception de l’organisation et du fonctionnement de la vie de notre nation.
C’est donc à juste titre que je m’honore du regard rétrospectif jeté par votre porte-parole sur l’ensemble des sacrifices que j’ai dû consentir au cours des événements douloureux qui ont jalonné la vie de notre pays, depuis le coup d’état du 24 décembre 1999 jusqu’à ce jour. J’ose espérer que ces sacrifices, tels qu’évoqués par votre porte-parole, ont été portés à la connaissance du Président Alassane Ouattara lors de l’audience qu’il vous a accordée le 23 avril dernier. Si tel est le cas, je salue votre initiative allant dans le sens de la recherche et de la préservation et de la sauvegarde d’une paix durable dans notre pays.
En ma qualité, à la fois, d’homme politique et d’homme d’Etat, je mesure à tout moment la responsabilité qui est la mienne de contribuer, inlassablement, à la cohésion sociale et à la protection des libertés publiques qui sont les fondements essentiels de toute démocratie participative et de l’Etat de droit. C’est donc, animé de ces valeurs républicaines que je me suis toujours inscrit, sans faiblesse et sans rancœur, dans la restauration de l’Etat de droit, pour une marche harmonieuse de notre pays, bien que certains démocrates ivoiriens se soient réjouis et aient salué le coup d’état de 1999.
Dès mon retour d’exil, j’ai pardonné aux auteurs de ce putsch et préconisé une alliance avec le RDR et d’autres forces politiques que sont l’UDPCI, fondée par Robert Guéi, l’auteur présumé, le responsable présumé de ce coup d’Etat. Cette alliance, née en 2005 à Paris s’est transformée en groupement politique dénommé RHDP dont j’ai assuré la présidence du présidium jusqu’à la date du 16 juillet 2018, jour de la naissance du Parti Unifié RHDP.
Ce groupement politique a remporté les élections présidentielles de 2010 et de 2015 à la grande satisfaction des militants des partis membres respectif du RHDP. Que s’est-il passé pour que ce groupement politique dénommé RHDP disparaisse le 16 juillet 2018 et devienne le même jour, le parti unifié RHDP lors d’une assemblée générale constitutive irrégulièrement convoquée par des responsables politiques du RDR.
Ces derniers n’avaient ni qualité, ni compétence pour convoquer cette assemblée générale constitutive du 16 juillet 2018. Oui ! Cette assemblée générale constitutive du 16 juillet était irrégulière. Elle n’a pas été convoquée par le président du présidium du RHDP que j’étais. Le projet de statuts de ce parti prévoyait l’observation d’un délai de 12 à 18 mois, à compter de fin mars 2018, date d’achèvement des travaux du comité de haut niveau. Et cette période de 12 à 18 mois, se situant entre mars 2019 et septembre 2019, devait permettre à chaque parti politique membre du RHDP de se prononcer définitivement sur son adhésion ou non à ce parti unifié RHDP.
Sans attendre la mise en vigueur de cette période, le PDCI-RDA a, au cours de son bureau politique le 17 juin 2018, reporté l’examen des statuts du parti unifié RHDP après l’élection présidentielle d’octobre 2020. Car les autres partis politiques membres de la coalition RHDP que nous étions, ont eu à rejeter l’alternance en faveur du soutien à un candidat PDCI-RDA à l’élection présidentielle de 2020. Ils ont refusé le soutien en faveur du PDCI RDA. Soutien préconisé, contenu dans l’appel de Daoukro que j’ai lancé ici le 17 septembre 2014 à Daoukro. Or, ce soutien, c’est le premier volet de cet appel de Daoukro qui a fait du président de la République sortant, Alassane Ouattara, le candidat unique du RHDP à l’élection présidentielle d’octobre 2015.
Malgré ces déconvenues, toujours animé par le souci de préserver l’union des partis du groupement politique RHDP, je me suis fait fort de rencontrer le 09 août 2018, en sa résidence, le Président Alassane Ouattara, devenu Président du parti unifié RHDP après ce que j’ai décrit, que je pourrais qualifier de coup d’Etat, le deuxième, au RHDP.
Mais cette visite de travail que j’ai obtenue du président à la suite de la requête que je lui ai adressée par le biais de Madame Henriette Diabaté, Présidente du RDR et Madame Kandia CAMARA, Secrétaire Générale du RDR . Cette requête disait quoi ? Elle précisait la nécessité de maintenir le groupement politique RHDP en l’état, tel que l’autorise la loi de 1993 sur les partis politiques et groupements politiques. Deuxièmement, de raffermir les liens entre les partis politiques du groupement RHDP en créant au sommet un organe chargé de superviser l’implantation à la base des coordinations locales et de gérer les arbitrages électoraux et enfin, permettre à chaque parti politique du groupement RHDP de conserver son autonomie de fonctionnement. Ce jour-là, mon jeune frère, le Président Alassane Ouattara m’a fait savoir que le parti unifié RHDP était définitivement créé à la date du 16 juillet 2018 et que le groupement politique RHDP avait vécu, donc qu’il avait été dissout. (Honorables Chefs Traditionnels) voilà l’effort de dialogue que j’ai entrepris, conformément au mandat qui m’a été donné par le bureau politique du PDCI-RDA du 17 juin 2018 pour poursuivre avec mes pairs du groupement politique RHDP le processus de création du parti unifié RHDP.
Au regard de cette situation et face aux menaces et autres tentatives de liquidation du PDCI-RDA, par voie judiciaire, au bénéfice du parti unifié, les membres statutaires de bureaux politiques des 24 septembre 2018 et d’octobre 2018 et du 6ème congrès extraordinaire du PDCI-RDA ont décidé à l’unanimité que le PDCI-RDA se retire du groupement politique RHDP et du processus de création du parti unifié RHDP, que le président du PDCI-RDA engage les négociations avec les acteurs politiques et la société civile pour l’élaboration d’un nouveau pacte social et ce, à travers la mise en place d’une plateforme, non idéologique, regroupant tous les partis politiques qui le désirent, et les forces vives de la nation éprises de paix, de justice et d’équité pour une Côte d’Ivoire rassemblée et réconciliée. Telle est à ce jour, la mission dans laquelle, je ne cesse de m’investir pour la recherche de la paix, de la collaboration, de la cohésion et de la stabilité de notre nation.
Honorables Chefs, vous noterez avec moi que je demeure fondamentalement attaché à la recherche de la paix. Vous n’en doutez pas, à entendre votre porte-parole. Mais pendant que par votre médiation présente, vous me demandez d’amorcer le dialogue avec le président de la République, que constatons nous à travers les actes posés en face par les tenants du pouvoir d’Etat ? Ils affirment, sans ambages, qu’il n’y a pas de salut en dehors du parti unifié RHDP ! Qu’il n’y a pas salut en dehors du parti unifié RHDP ! S’Il n’y a pas de salut, qu’est-ce qu’il y a ? il y a la mort. Et C’est pourquoi, ils se permettent de leur côté, comme en témoignent les pressions, les chantages et autres menaces exercées sur les cadres du PDCI-RDA et des autres partis politiques, les limogeages injustifiés de certains hauts responsables de l’administration Ivoirienne pour avoir refusé d’adhérer au parti unifié RHD, puisque hors de ce parti, il n’y a pas de salut. Quelle est donc la voie pour mener un tel dialogue, si la simple liberté d’opinion du citoyen et surtout de fonctionnaire consacrée par la constitution, n’est pas garantie ?
Dans ce contexte, et l’on assiste à un recul grave des acquis démocratiques, je comprends, Honorables Chefs Traditionnels, vos craintes et vos angoisses par rapport à l’avenir, quand on sait que de simples élections locales en octobre 2018 ont entraîné des violences avec morts d’hommes, des intimidations et des menaces exercées sur certains candidats en les excluant du jeu démocratique , en les maintenant injustement en exil, tel mon collaborateur, Noël Akossi Benjo dont on doit parler ici et qui est également votre fils, pour les Atchan. Pour tous les Atchan, je vous prie de vous engager à œuvrer avec moi, activement et effectivement pour son retour dans les tous prochains mois en Côte d’Ivoire. Son retour en Côte d’Ivoire est un droit constaté par la constitution qui interdit le bannissement. Vous convenez avec moi que le malaise est réel et profond au regard de tous les faits évoqués. Toutefois, je ne désespère pas.
Au nom de la paix et de la nécessaire réconciliation entre les fils et fils de Côte d’Ivoire, je vous renouvelle mon attachement et mon adhésion au dialogue qui pour moi demeure l’arme des forts, tel que nous l’a enseigné le père fondateur Félix Houphouët Boigny. Mais vu que toutes les inquiétudes, toutes les peurs, découlent des activités du RHDP parti unifié, hors duquel il n’y a pas de salut, Que peut-on faire ?
Avant de clore mes propos, je voudrais vous remercier pour avoir effectué le déplacement jusqu’à Daoukro pour réaffirmer la portée du dialogue, d’ailleurs jamais rompu, entre le Président de la République, Alassane OUATTARA et moi-même. Mais de quel dialogue ! il s’agit simplement de temps en temps de se passer des coups de fils, de se souhaiter bonne fête ou bien dire Yako pour tel décès. Mais ce n’est pas le dialogue concernant la gestion des affaires de l’Etat pour lesquelles je ne suis plus jamais associé. C’est le dialogue pour la gestion de l’Etat et le dialogue pour des élections apaisées, transparentes et crédibles en 2020 qui ne peut pas prospérer dans le contexte d’un RHDP parti unifié, hors duquel il n’y a pas de salut. Enfin, à votre retour, je vous prie d’adresser ce message à Alassane Ouattara et traduire mes vives et chaleureuses salutations aux vaillantes et laborieuses populations de vos circonscriptions respectives (…) »
Blaise BONSIE