La tête d’Irène Vieira, directrice générale du Bureau Ivoirien des Droits d’Auteurs (BURIDA) est mise à prix par un collectif d’artistes pour fautes lourdes. Sa revocation votée au cours d’une assemblée générale tenue vendredi 28 septembre 2018 par 98 artistes contre 5. Elle ne l’entend pas de cette oreille.
« Il est mis, par voie de conséquence, fin, à son service. Nous demandons au Conseil d’Administration, l’application immédiate de la résolution de cette Assemblée générale et de proposer, dans les plus brefs délais, un directeur général intérimaire conformément au décret 2015 – 271 du 22 avril 2015 », dixit Diallo Ticouai Vincent, porte-parole de l’Assemblée générale tenue vendredi dernier à Cocody, sous des ovations nourries de ses pairs.
De l’eau dans le gaz
Les accusations de l’artiste Pat Sako à l’égard du ministre de la Culture Maurice Bandaman, relatives à un détournement de 240 millions Frs Cfa issus des droits auteurs, ont apporté de l’eau au moulin de plusieurs artistes réunis au sein du CACB (Collectif d’Artistes pour le Changement au Burida) présidé par Koné Ibrahima Khalilou dit Fadal Dey. Une levée de boucliers enrichie et fécondée par un rapport d’audit financier effectué par le cabinet Global Audit et Conseil effectué du 2 février 2012 au 15 octobre 2015. Lequel rapport, que l’Eléphant a pu lire, fait état de violations des règles de bonne gouvernance.
Plusieurs sommes d’argents importantes partant au ministère de la culture en nom propre du directeur administratif et financier, un agent dudit ministère…décaissement de 40 millions Frs Cfa remis au même ministère pour la création d’une usine de disque qui n’a jusque-là jamais vu le jour…organisation d’un gala de bienfaisance à hauteur de 150 millions Frs Cfa pour ne recolter que 7 millions Frs Cfa…mauvaises déclarations aux impôts et leurs corrollaires de redressements fiscaux estimés à 200 millions Frs Cfa aux frais du BURIDA…gestion opaque de l’assiette de perception des artistes…10% de frais de repartition prélévés en plus des 35% des frais de gestion, etc, ; sont autant de fautes que reproche ce collectif d’artistes à la directrice générale. Des fautes dont la gravité a suscité l’intervention du G14, un autre collectif aux côtés de celui présidé par Fadal Dey.
Accusée, défendez-vous
Poussée dans ses retranchements, Irène Vieira donne de la voix. « Le Directeur Général que je suis ne se sens pas concernée par une résolution prise par un organe incompétent et qui de surcroît est nul et de nul effet », retorque-t-elle, s’arc-boutant sur l’incompétence pour l’Assemblée générale annuelle à la revoquer, se référant à l’article 23 du décret 2015-271 du 22 avril 2015 fixant les attributions, l’organisation et le fonctionnement du BURIDA qui stipule : « L’Assemblée Générale annuelle est chargée :
– D’élire en son sein les membres du Conseil d’Administration, en dehors de ceux désignés par le Ministre chargé de la culture ;
– D’établir la feuille de route du Conseil d’Administration pour la durée de son mandat ;
– D’entendre les rapports annuels du Conseil d’Administration relatifs à la situation morale et financière du BURIDA et de statuer sur ces rapports ;
– De statuer sur le rapport du Conseil d’Administration relatif à la gestion du fonds spécial d’action culturelle et sociale ;
– D’entendre le rapport du Conseil d’Administration et de statuer sur la mise en œuvre de la feuille de route ;
– D’entendre le rapport spécial du commissariat aux comptes ;
– D’approuver le règlement général soumis par le Conseil d’Administration.
Lors des assemblées annuelles, les décisions sont prises à la majorité absolue des voix émises. Les votes blancs ou irréguliers ne sont pas pris en compte ».
Pour Mme Viera donc, « l’Assemblée Générale annuelle, dont les compétences sont limitativement fixées par ce décret (Statuts), n’a aucune compétence pour révoquer ou ordonner la révocation du Directeur Général ».
Le dimanche 30 octobre, trois membres du Conseil d’Administration, notamment Orentchi, Were-Were Liking et Paul Niamké sont montés au créneau pour lancer un appel à la cohésion au sein du Conseil d’administration du Burida et des sociétaires, et à prendre conscience du « danger actuel qui pèse sur la maison de notre propre fait ».
Dans une vidéo publiée sur sa page Facebook, l’artiste Fadal Dey soutient que la directrice n’a pas refuté les faits qui lui sont reprochés. Elle a admis, dit-il, avoir injecté 120 millions Frs Cfa et non 150 millions Frs Cfa dans le diner de bienfaisance dénommé ‘‘Solidartiste’’. En somme, la revocation de Irène Vieira semble sur le point de non retour.
CYRILLE NAHIN