Le Père Patrice François, ancien curé de la cathédrale de Cayenne, est actuellement en mission d’étude en Côte d’Ivoire et plus précisément à l’université Catholique de l’Afrique de l’Ouest à Abidjan. Le prêtre a accepté de relater à France-Guyane, la gestion du coronavirus sur place.
Comment vivez-vous la situation sanitaire du moment ?
Comme dans presque tous les pays du monde, la scolarité a été suspendue en Côte d’Ivoire depuis près de dix jours ! Tous les habitants ont été invités à se confiner en raison du Covid-19 qui fait de nombreuses victimes dans le pays.
Les mesures mises en place par le gouvernement rassurent la population d’autant plus que l’épidémie progresse lentement en comparaison à d’autres pays.
De mon côté, c’est dans la foi et dans l’obéissance aux mesures gouvernementales mises en place que je vis ce moment. Une occasion supplémentaire que j’ai pour prier davantage pour notre conversion et notre sanctification.
Comment les choses se passent dans votre région ?
En plus du confinement, un couvre-feu a été instauré sur tout le pays. Ce qui n’est pas toujours facile et évident à vivre.
D’autre part, en soutien à l’effort gouvernemental, un élan de solidarité des entreprises et des particuliers s’est mis en place afin qu’un maximum d’habitants ait de quoi se protéger du coronavirus et limiter sa propagation.
Avez-vous l’occasion de voir ou de soutenir des malades ?
Compte tenu de la situation, c’est par la prière quotidienne et notamment la célébration de l’eucharistie en plus de l’observance des règles d’hygiène ou « des mesures barrières » mises en place que je viens en aide aux habitants du pays, de Guyane et du monde.
N’étant pas en mission sur une paroisse en temps normal, je ne suis pas particulièrement en contact avec les fidèles. Mais grâce à quelques missions ponctuelles, j’arrive quand même à en rencontrer quelques-uns et le soutien se fait à travers nos échanges téléphoniques.
Les observateurs mondiaux craignent une catastrophe sanitaire dans les pays d’Afrique, quel est l’état d’esprit de la population qui vous entoure ?
Chaque pays à sa réalité sanitaire propre. Néanmoins, si je reconnais qu’il y a beaucoup à faire sur plan sanitaire dans le pays, je n’ignore pas les efforts consentis par le gouvernement pour protéger la population.
Et, comme je disais , l’élan de solidarité qui se met progressivement en place, participe aussi à ce désir de ne perdre aucun des enfants du pays.
A côté de cela, la Côte d’ivoire reçoit aussi des aides financières ou matériels en provenance d’organisations internationales, de particuliers ou d’entreprises localisées à l’extérieur du pays ou du continent.
Si le pays n’est pas doté de tous les moyens présents dans beaucoup de pays développés néanmoins, le gouvernement fait tout ce qu’il peut pour endiguer l’épidémie ou limiter la propagation du virus.
Si chacun fait un effort dans le respect des mesures mises en place alors, nous réussirons à vaincre ce fléau et à éviter une catastrophe sanitaire dans le pays.
Quelles sont les dispositions prises sur place pour ralentir l’épidémie ?
Je constate que le gouvernement ivoirien procède à une campagne de lavage des rues et des marchés publics, à la désinfection des lieux publics, des véhicules des transports en commun (taxis ou bus) et, à la distribution de petits flacons de gels hydro-alcooliques et petits seaux à eau avec robinet pour se laver les mains aux services publics, aux entreprises et aux particuliers. Bien d’autres mesures sont mises en place ou se développent.
Tout s’est-il arrêté sur place ou la vie continue-t-elle d’une manière ou d’une autre ?
La réalité ivoirienne est bien différente de celle que nous connaissons aux Antilles-Guyane ou en Métropole mais, elle est commune à celle de tout le continent africain.
La vie ne peut pas être arrêtée car pour beaucoup d’habitants, chaque jour procure le pain du jour. Demander un confinement total serait soit accélérer la mortalité soit provoquer un soulèvement de la population.
Alors pour éviter cela, il est préférable que la vie continue même si c’est au ralenti. Grâce à l’instauration du couvre-feu qui est relativement bien respecté, le gouvernement parvient à arrêter ou du moins à ralentir la circulation du virus et le processus de contamination.
Gardez-vous le contact avec la Guyane ?
Afin de bien profiter de ce temps d’étude mais aussi de ressourcement, j’ai considérablement diminué mes contacts avec la Guyane et notamment avec les fidèles de la paroisse dont j’ai été le curé. En effet, à travers cette coupure, je prends aussi un peu de recul pour relire mon expérience sacerdotale et pastorale en Guyane.
Regrettez-vous de ne pas être chez vous, avec vos fidèles ?
Oh non, pas du tout ! Je rends grâce à Dieu pour ce temps hors du diocèse. Car je découvre autre chose, un autre pays, de nouvelles personnes et une autre réalité ecclésiale et pastorale. Chaque jour, Je m’enrichis de nouvelles rencontres. C’est une chance que j’ai d’être ici alors, j’en profite.
Quel message avez-vous pour eux ?
Le coronavirus n’est l’ami de personne, mais ce n’est pas une raison pour s’enfermer dans la peur. En regardant bien, son passage oblige chaque être humain à faire une pause pour regarder sa vie, sa place dans la société et pour quelques-uns, la famille dans laquelle Dieu les a placé.
Oui, une chance pour prendre du temps en famille, pour discuter, prier et réaliser que la vie mérite d’être vécue et dire merci.
La meilleure manière de rendre service à quelqu’un ou de lui prouver notre amour en cette période, c’est de rester bien confiné chez soi et demander à Jésus de bénir toutes les familles de la terre. Bonne semaine sainte à tous et joyeuse montée vers pâques à chacun.