La guerre de succession prend fin. Le rite doit se tenir dans le plus grand secret : le nouveau roi des Zoulous, souverain coutumier le plus puissant d’Afrique du Sud, sera couronné, samedi 20 août, après une querelle sans fin pour la succession au trône du légendaire « peuple du ciel ». Dans ce pays d’Afrique australe aux 11 langues officielles, les souverains et chefs traditionnels sont reconnus par la Constitution. Rois sans pouvoir exécutif, ils exercent une profonde autorité morale et sont vénérés par leur peuple.
Succession
Pour succéder à son père Goodwill Zwelithini, mort l’année dernière après 50 ans de règne, Misuzulu Zulu, 47 ans, entrera comme le veut la tradition dans « l’enclos à bétail » du palais de KwaKhethomthandayo, à Nongoma, petite ville de la province du KwaZulu-Natal (KZN, sud-est) et berceau de la plus grande ethnie d’Afrique du Sud. Seuls quelques membres de la famille royale et amaButho (guerriers) seront autorisés à pénétrer dans cette sorte de temple de la Nation zouloue. Le souverain, adoubé par les ancêtres pendant ce premier rite de passage, « sera ensuite présenté à la nation qui s’engagera à le respecter et l’accepter comme roi », explique Gugulethu Mazibuko, spécialiste en cultures africaines à l’Université du KZN.
« Les Spartiates d’Afrique »
Les 11 millions de Zoulous du pays, un Sud-Africain sur cinq, répondent généralement en masse aux invitations à célébrer leur culture. Les femmes, en tenues traditionnelles, hululent et frappent le sol en cadence. La grandeur et la renommée du peuple zoulou, qui résonnent au-delà des frontières africaines, reposent originellement sur les exploits de Chaka, impitoyable guerrier et créateur de l’armée qui, au XIXe siècle, remporte une bataille sanglante contre l’Empire britannique. Des guerriers pieds nus, habillés de jupes en peau de singe et de bracelets, défont une armée régulière. L’imaginaire fait le reste, les historiens trouvent un surnom : « les Spartiates d’Afrique ».
Guerre de palais
Récemment c’est à l’intérieur du palais que la bataille a fait rage. Fils de la favorite du roi défunt, Misuzulu Zulu est contesté par la première épouse et ses descendants. Le roi Goodwill Zwelithini avait au total six femmes et au moins 28 enfants. Le week-end dernier, le clan dissident a célébré le couronnement de l’aîné de sa lignée, dans une tentative désespérée de s’emparer du trône. La première reine, qui a porté son courroux devant les tribunaux, clame être la seule légitime. Et ses filles contestent l’authenticité du testament. Son exécution a été suspendue mais la reine, elle, a été déboutée. Et dernier rebondissement dans la saga royale, des frères du roi défunt ont annoncé un mystérieux troisième prétendant au trône.
Fortune
Outre la couronne, la fortune du roi est également au centre de la dispute. Le roi zoulou est un riche propriétaire de terres gérées par un trust dont il est seul administrateur. Il détient près de 30 000 km2, soit la superficie de la Belgique. Et près de 1 500 propriétés dont il peut tirer des loyers. Connu pour mener un train de vie fastueux, le roi Zwelithini percevait environ 75 000 euros de l’Etat par an pour son usage personnel, ainsi qu’un budget de 4,2 millions d’euros pour le fonctionnement du royaume, selon un barème publié au journal officiel.
Dans les prochains mois, le président Cyril Ramaphosa scellera le couronnement en reconnaissant formellement le roi des Zoulous, espérant mettre fin aux rivalités qui menacent la paix sur le royaume.