La psychose s’amplifie dans le pays chaque fois qu’un corps d’enfant sans vie est retrouvé. La dernière victime n’avait que 4 ans. Un petit garçon disparu pendant quatre jours et retrouvé mort dans la région de Kédougou. Pour le sociologue sénégalais Mamadou Moustapha Wone, il s’agit de crimes rituels liés notamment à la coupe du monde qui pointe son nez. Il s’est confié à Géopolis Afrique.
Le petit Faciré Contaga n’avait que quatre ans. Ses parents avaient perdu sa trace pendant quatre jours. Le corps meurtri du petit garçon a été retrouvé à quatre kilomètres de son village, amputé à hauteur de son poignet gauche.
Le 19 mars 2018, c’est un autre garçonnet, âgé d’à peine deux ans, qui a été retrouvé mort à Rufisque, près de Dakar. Son corps gisait dans un sac poubelle non loin de son domicile familial. Le petit Falou avait disparu depuis cinq jours, alors qu’il jouait avec sa sœur jumelle devant la maison familiale.
Des cas d’enlèvements, de disparitions, et parfois de viols d’enfants suivis de meurtre. C’est ce qui est arrivé à une fillette de 8 ans le 24 février 2018. Envoyée par sa mère pour acheter du café et du lait, elle n’est plus revenue à la maison. Les recherches permettront de découvrir plus tard son corps emballé dans un sac en plastique. Les analyses révèleront qu’elle a été violée avant d’être tuée, indique l’agence de presse africaine (APA).
«Contenter les forces obscures pour gagner la Coupe du monde»
Choqué comme ses compatriotes, le sociologue Mamadou Moustapha Wone explique à Géopolis que le phénomène a atteint un cap encore jamais franchi. Il est persuadé qu’on a affaire à des crimes rituels.
«Ce phénomène est lié à deux événements qui pointent leur nez dans quelques mois. Le premier, c’est la Coupe du monde à laquelle le Sénégal est partie prenante. Des gens pensent qu’en essayant de contenter les forces obscures, on peut gagner certaines causes comme la Coupe du monde. On est dans une société qui baigne encore dans une très grande irrationalité. Des gens croient qu’on peut sacrifier des êtres vulnérables comme des enfants, des albinos, des aveugles ou des vieillards. C’est une société qui est encore à cheval sur des croyances dignes de l’obscurantisme.»
«Egorgés par des politiciens sans scrupules pour un strapontin»
Mamadou Moustapha Wone pointe aussi l’élection présidentielle sénégalaise prévue en 2019. Il se souvient que le scrutin organisé en 2012 avait déjà donné lieu à des crimes rituels d’enfants. Une hypothèse avancée aussi par la presse sénégalaise qui exprime son indignation.
«Des sacrifices humains peuvent-ils permettre à un candidat de gagner un poste électoral?», s’interroge le site d’information Senepeople. Notre confrère rappelle l’histoire de tous ces garçons et filles «égorgés par les politiciens sans scrupules» dont le seul souci est d’occuper un strapontin qui lui permettra de puiser à fond dans l’argent du pauvre contribuable.
«Il y a un marché d’enfants» exposés aux prédateurs
Au Sénégal, certains n’hésitent pas à mettre en cause la responsabilité de l’Etat dans ce drame. C’est le cas du psychologue Serigne Mor Mbaye qui déplore le fait que 40.000 enfants communément appelés Talibés vivent dans la rue où ils s’adonnent à la mendicité, exposés à n’importe quel prédateur. Pour lui, «il y a un marché d’enfants» au Sénégal.
Mamadou Moustapha Wone explique à Géopolis qu’au Sénégal, la cause de l’enfant n’est pas considérée comme une priorité nationale.
«Il ne faut pas se voiler la face, il y a beaucoup d’enfants dans la rue au Sénégal. Des enfants exploités par le travail. Ici au Sénégal, faire travailler un enfant n’est pas un problème, tout comme le faire mendier. Ce sont des pratiques ancrées dans les mentalités. Il faut reconnaître que la cause de l’enfant n’est pas considérée comme une cause nationale», regrette-t-il.
Un climat de peur et de suspicion dans le pays
Le sociologue sénégalais constate qu’un climat de peur et de suspicion s’est installé dans le pays. Comme la plupart des parents, il a interdit désormais à ses enfants de se promener seuls dans les rues de Dakar.
«Nous avions l’habitude de laisser nos portes ouvertes. Désormais nous les verrouillons», témoigne un parent sénégalais. Un autre raconte le cauchemar de son fils qui s’est réveillé au milieu de la nuit en pleurant et en criant: «Ne m’emmenez pas.»
Le collectif sénégalais Silence on tue nos enfants a organisé une marche dans la capitale fin mars pour dénoncer ces crimes. Le président sénégalais a (…)